Sur le logement social

Publié le par Gérard Perron

 

L’offre de logements locatifs sociaux

doit  répondre à l’augmentation

et à la fragilisation des demandeurs.

L'Intervention de Gérard PERRON

 L’Abbé Pierre, la personnalité que la France aimait le plus vient de décéder. Il était âgé de 94 ans, une vie remplie de combats contre la misère dont 53 ans pour le droit au logement pour tous. C’est en effet en 1954 qu’il lança son action pour les mal-logés.

53 ans après, il y a encore beaucoup à faire. Les actions menées par les associations de défense des mal-logés et des SDF depuis le mois de décembre ont montré l’ampleur de ce qui reste à faire pour que le droit au logement ne soit pas qu’un slogan.

Voilà ce qu’écrivait la Fondation de l’Abbé Pierre dans la Gazette des Communes du 11 décembre 2006 : « Depuis 3 ans le rythme de la construction s’est accéléré pour atteindre 410 000 logements en 2005, soit le rythme le plus élevé depuis 20 ans. Malgré ce résultat encourageant une préoccupation majeure persiste : celle concernant la nature des habitats construits et les ménages susceptibles d’en être les destinataires. En réalité, la production de logements à caractère social reste réduite : les habitats destinés au locatif ou à l’accession en dessous des plafonds de ressources de prêt locatif à usage social (PLUS) – c'est-à-dire qui renvoient aux deux tiers des foyers en France, aujourd’hui – ne constituent que 24 % de l’offre nouvelle (98 400 logements).

 

Plus inquiétant encore, la part des logements locatifs sociaux se limite à 9,7 % des 410 000 nouvelles constructions (soit 39 770), sachant que la production repose pour l’essentiel sur les logements locatifs sociaux aux loyers les plus élevés (les PLS), donc les moins sociaux, qui rencontrent davantage de succès que les logements financés en PLUS (le logement social « de base ») et en PLA-I (le logement « très social », destiné aux familles disposant de faibles ressources et rencontrant des difficultés sociales)…Aujourd’hui plus de 1,3 million de personnes sollicitent un logement social. Les deux tiers d’entre elles ont des ressources inférieures à 60% des plafonds PLUS. A l’évidence, les mécanismes mis en place pour soutenir la construction tirent l’offre « vers le haut ». Cela, alors même que les besoins sont insuffisamment couverts, comme en témoignent les difficultés rencontrées par nombre de ménages aux portes du logement (à la rue, en camping à l’année, en foyer, à l’hôtel, etc), dans des logements surpeuplés ou insalubres, ou en attente d’une potentielle, mais peu probable, mobilité ».

L’offre de logements locatifs sociaux doit donc impérativement et rapidement répondre à l’augmentation et à la fragilisation des demandeurs. Des logements bien répartis sur l’ensemble du territoire permettant aussi de constituer une alternative à la concentration de familles modestes dans les grands ensembles d’habitat social populaire.

L’article conclut en appelant à « une relance massive de la production de logements locatifs sociaux, laquelle devrait tripler dans les années à venir pour atteindre le chiffre de 120 000 hors PLS contre près de 40 000 aujourd’hui. En l’absence d’une telle mobilisation, il est vain d’envisager une amélioration des conditions de vie de centaines de milliers de ménages qui souffrent aujourd’hui d’une crise du logement qui ne cesse de se renforcer et de s’ancrer dans le temps ».

Je crois aussi profondément que s’il n’y a pas une profonde remise en cause des politiques publiques du logement mises en œuvre depuis près de 30 ans, nous serons confrontés demain à des mouvements sociaux et urbains dont nous ne soupçonnons pas les conséquences politiques économiques et sociales.

La démonstration est faite aujourd’hui que le seul marché du logement n’est pas en capacité de répondre aux besoins en logement de la population. Il est du rôle et de la responsabilité de l’Etat d’adopter des politiques publiques qui permettent de satisfaire à ces besoins. Je rappelle à ceux qui faisaient déjà de la politique à cette époque que la France l’a déjà fait par le passé lorsque entre 1967 et 1973 elle construisit 120 000 logements sociaux par an.

Aujourd’hui le financement du logement social a montré ses limites dans un contexte de renchérissement continu des coûts de construction, d’augmentation des taux d’intérêt qui le finance et de réduction des aides de l’Etat à la pierre que ne peuvent compenser les Collectivités Locales.

Le surenchérissement du prix du foncier et des prix de l’immobilier pose très clairement la question de leur déconnexion d’avec la réalité économique qui fait qu’aujourd’hui le logement est trop cher et le logement social trop rare.

Des mesures faites de contrôle et de régulation du marché du logement s’imposent afin que les aides soient enfin dispensées en fonction de leur utilité sociale pour le plus grand bien de la majorité de nos citoyens. Le financement du logement social doit être réévalué car lui seul, au travers de ses loyers plafonds, de ses conditions réglementées d’accès, de son cadre de mission de service public soumis au contrôle des pouvoirs publics est en mesure de garantir que demain les ménages modestes comme les classes moyennes seront logés dans des conditions décentes et à des prix accessibles. Quelle meilleure illustration de cette affirmation que nos loyers qui sont actuellement inférieurs au privé de 30 à 40 % en collectifs et de 20 à 30 % en pavillons !

Mais pour cela, il faudra une véritable politique du logement qui inverse la tendance constante à la réduction de la part de la richesse nationale consacrée au logement qui n’est plus que de 1,8 % en 2006 quand elle était de 2,1 % en 1981.

Ce sera la meilleure manière de rester fidèle à la mémoire de l’Abbé Pierre et au combat qu’il a mené toute sa vie.

Publié dans CONSEIL GENERAL

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